Margaux Thibaut
27/2/2024
6 mins

Le Digital Markets Act : Réguler le marché du numérique pour une concurrence équitable

 

Le DMA, qu'est-ce que c'est?

Le Digital Markets Act est une proposition législative de l'Union Européenne visant à réguler les géants du numérique tels que les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft), afin de promouvoir une concurrence équitable et garantir un environnement numérique plus ouvert et innovant. L'objectif avec ces nouvelles réglementations est de mettre fin à la dominance de ces géants du net, aussi appelés "gatekeepers" ou "contrôleurs d'accès".

En quelques dates

  • Le règlement DMA date du 14 septembre 2022, et est entré en vigueur le 1 novembre 2022,
  • Il est progressivement applicable depuis le 2 mai 2023,
  • A partir du 6 mars 2024, il entre en application effective : les géants du net peuvent avoir de lourdes amendes s'ils ne respectent pas leurs obligations et interdictions.

Les objectifs du DMA

L'objectif principal du DMA est de garantir un marché du numérique équitable et ouvert, en empêchant les gatekeepers d'imposer des conditions inéquitables aux entreprises et aux utilisateurs, et d'avoir recourt à des pratiques anticoncurrentielles. Cette ouverture doit permettre l'innovation sur le marché numérique.

 

Les dispositions misent en place

A partir du 6 mars 2024, les entreprises considérées comme gatekeepers devront donc se plier aux nouvelles réglementations. Elles sont une vingtaines et régulent désormais le marché numérique sous forme d'obligations et d'interdictions.

 

Les gatekeepers doivent:

  • Permettre l'interopérabilité des services de messagerie : cela permettra concrètement à un utilisateur de Messenger de discuter avec un utilisateur de WhatsApp;
  • Fournir aux entreprises utilisatrices un accès aux données générées par leurs activités; et aux entreprises qui font de la publicité sur leur plateforme un accès à des outils de mesure de performance;
  • Permettre aux utilisateurs de désinstaller facilement des applications préinstallées ou de modifier les paramètres par défaut des systèmes d'exploitation, des assistants virtuels ou des navigateurs web par exemple;
  • Permettre aux utilisateurs d'installer des applications ou des boutiques d'applications de tiers;
  • Rendre aussi facile le système de désabonnement que d'abonnement aux services de plateforme essentiel;
  • Autoriser les entreprises utilisatrices à promouvoir leurs offres et de conclure des contrats en dehors de la plateforme du gatekeeper.

Les gatekeepers ne pourront plus:

  • Favoriser les services et produits offerts par le gatekeeper lui-même dans le classement par rapport à des services ou produits similaires offerts par des tiers;
  • Imposer les logiciels par défaut lors de l'installation, et empêcher les utilisateurs de désinstaller un logiciel ou une application préinstallés;
  • Imposer aux développeurs d'applications certains services (tels que les système de paiement) afin d'apparaitre dans les boutiques d'applications;
  • Pister les utilisateurs à des fins de publicités ciblées sans l'obtention de son consentement.

Qui est visé?

Les entreprises sont définies comme gatekeepers si elles détiennent une position économique et financière solide et durable. Des seuils sont définis dans le DMA:

  • Une capitalisation boursière supérieure à 75 milliards d'euros, ou un Chiffre d'affaires dans l'UE supérieur à 7,5 milliards d'euros sur 3 années consécutives.
  • Un service de plateforme avec plus de 45 millions d'utilisateurs actifs mensuels, et 10 000 entreprises utilisatrices actives par an au sein de l'UE.

Les sanctions applicables

En cas de non respect des nouvelles réglementations, la Commission européenne pourra infliger une amende pouvant aller jusqu'à 20% du chiffre d'affaire mondial. En cas de récidive, l'interdiction d'opérations d'acquisition d'entreprise, voire le démantèlement de leurs activités pourront être appliquées.

 

En tant que marketer, qu'est-ce que ça change au quotidien ?

En tant que marketer, le DMA apporte plusieurs changements significatifs au quotidien, notamment en ce qui concerne la gestion des données utilisateurs.

 

Les ciblages publicitaires seront soumis à des exigences de consentement toujours plus explicites. Pour mener des campagnes d'acquisition payantes, le consentement est obligatoire (type Axeptio). Il faudra passer par une CPM validée (Consent Management Platform), qui permet aux utilisateurs de donner leur consentement pour l'utilisation de leurs données personnelles : la petite pop-in "J'accepte/ Je refuse les cookies" dès que vous arrivez sur un site. Cette exigence vise à renforcer la protection de la vie privée des utilisateurs et à garantir une transparence dans l'utilisation de leurs données à des fins publicitaires.

 

Dans ce contexte il est intéressant et important de se concentrer sur la collecte des données First Party. Plutôt que de dépendre des données Third Party, sujettes à des restrictions croissantes. Il est donc crucial d'investir dans l'infrastructure nécessaire pour récupérer, centraliser et qualifier la donnée. Mais ce n'est pas tout de constituer une grande base de donnée, afin qu'elle ait un intérêt, il est essentiel de la centraliser de manière efficace.

 

 

Le Digital Markets Act représente une tentative de la part de l'Union Européenne de réguler un secteur qui a longtemps échappé à toute forme de réglementation significative. Son adoption et sa mise en œuvre réussies pourraient façonner le paysage numérique européen et mondial pour les années à venir, en favorisant une concurrence équitable, en encourageant l'innovation et en protégeant les intérêts des consommateurs.

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